Afin de faciliter l’accès à l’apprentissage, les organismes de formation peuvent profiter d’une singularité fiscale : l’exonération de TVA.
Choix politique et social, cette particularité a pour but de résorber le chômage, une configuration qui permet une meilleure synergie entre les organismes et les formateurs indépendants, Pôle Emploi et les particuliers.
Par raccourci, certains acteurs du secteurs pensent ainsi que cette exonération est automatique. C’est une erreur ! En effet, chaque organisme de formation ou formateur indépendant a le choix d’être soumis ou non à la TVA.
De cette incompréhension découle plusieurs risques, des risques que nous allons identifier tout au long de cet article.
Rappel sur le droit à l’exonération de TVA dans la formation
Tout d’abord, chaque organisme de formation doit vérifier qu’il remplisse bien les conditions fixées par le service public.
Effectivement, les exigences sont très clairement identifiées. Tout d’abord, concernant les « professionnels concernés » :
- Travailleur indépendant
- Association
- Société
- Organisme paritaire titulaire d’un agrément
- Personne morale de droit public ou privé
Bon à savoir : comme indiqué, « Les prestations exonérées peuvent avoir lieu dans le cadre de l’enseignement primaire, secondaire, supérieur, universitaire, technique ou professionnel, de la formation professionnelle agricole ou continue, y compris à distance ».
Ensuite, le service public fixe plus précisément les « prestations exonérées » de TVA :
- Prestation de formation professionnelle à proprement dit. À savoir ici que la réalisation de bilan de compétences est considérée comme une prestation de formation professionnelle.
- Les prestations de livraisons de biens ou de services liées au secteur de la formation. Cela va du logement et de la nourriture des stagiaires, offre de documents pédagogiques etc.
- Les prestations d’accompagnement et de suivi ayant pour but de favoriser l’insertion professionnelle, dans le sens des demandeurs d’emploi.
- La transmission de connaissances liée à l’enseignement scolaire, universitaire, professionnel, artistique ou sportif, proposée par des personnes physiques, rémunérés directement par les apprenants.
Bon à savoir : sont exclues les prestations de livraison de matériels non dédiés à la pédagogie, la location de salles aménagées et les prestations de conseil et de recrutement.
Lorsque l’on se penche sur le cas des prestataires de formation continue, l’exonération de TVA est seulement applicable sous les conditions suivantes :
- Avoir fait sa déclaration initiale d’activité.
- L’obligation de dépôt annuel du bilan pédagogique et financier doit être à jour (sauf si l’organisme vient d’être créé).
- Avoir obtenu l’attestation fiscale via l’envoi du formulaire 3511 au Service régional de contrôle (SRC) de la formation professionnelle de la DIRECCTE. Pour le reste, l’exonération s’appliquera au moment de la réception du formulaire, ce qui supprime toute rétroactivité.
Bon à savoir : si l’attestation n’est pas délivrée dans les trois mois après son envoi, elle est considérée comme automatiquement accordée.
Le risque d’oublier de notifier sa demande d’exonération à la DIRECCTE
Si les conditions sont clairement identifiées, elles sont donc nombreuses. Le premier risque est alors d’oublier tout simplement de notifier sa demande d’exonération de TVA à la DIRECCTE. Et ici, les conséquences peuvent être dramatiques ! Exemple : une reprise de la TVA sur plusieurs années à travers un rattrapage fiscal. Ce cas de figure est loin d’être anodin, et pour plusieurs raisons. Explications.
1er cas de figure : Quand on commence une activité dans le secteur de la formation, nous nous retrouvons nativement en dessous du seuil de TVA applicable (ce fameux seuil de TVA applicable qui concerne également les SASU ou les micro entreprises, selon leur chiffre d’affaires).
De cette manière, cela créé automatiquement une ambiguïté : En tant qu’organisme de formation, suis-je exonéré de TVA car je me situe en dessous du seuil, ou suis-je exonéré de TVA car je suis par essence un organisme de formation ? Résultat des courses : nous ne savons même pas pourquoi nous serions exonéré ou non. Au titre du seuil du CA annuel, ou au titre de notre statut ? À travers ce point de friction, beaucoup d’organismes de formation, même après plusieurs années de développement, finissent par tout simplement oublier cette demande d’exonération.
2ème cas de figure : attardons nous maintenant sur ce stade. Je suis un formateur indépendant, et je n’ai pas d’expert comptable (pour rappel, cette exonération de TVA n’est pas automatique!). Tandis qu’en tant qu’indépendant, 100% de mon temps est consacré à mon coeur d’activité, qui va me rappeler cette petite subtilité au moment où je vais dépasser le seuil de CA lié à l’exonération de TVA ?
Pour continuer à profiter de cet « avantage », il va en effet falloir effectuer l’ensemble des démarches nécessaires, tout seul. Si ce n’est pas l’oubli, c’est aussi donc le manque de temps qui peut tout simplement vous amener à faire cette erreur, une erreur qui peut couter très cher !
3ème cas de figure : vous êtes un formateur ou un organisme de formation prévoyant, et vous décidez dès le début de faire appel à un expert comptable. Pour le reste, à chacun son métier. Souvent, les experts comptables induisent naturellement que la demande d’exonération a été faite, au commencement de l’activité. Mais cela, c’est sans prendre en compte le cas de figure numéro 2 ! un manque d’informations qui provoque une avalanche de problèmes.
Le temps passe, et le sujet est enfin abordé. Vous souhaitez le rectifier. Problème : 100 000 euros de facture ont déjà été encaissés. 100 000€ TTC, alors qu’en réalité, l’organisme aurait du encaisser 83 333€ HT. Résultat : l’organisme doit à l’État 16 667€ (100 000 – 83 333). Et dans la plupart des cas, cette découverte est loin d’être autonome, et à plutôt lieu lors d’un contrôle fiscal.
Aussi, il faut savoir que cette problématique est rarement soulevée au bout de quelques mois, et c’est souvent lors de sa 5ème année que l’organisme de formation doit faire face à ce redressement. Ici, ce n’est plus 16 667€, mais 83 335€ (16 667€ x 5) qui sont dus.
Bon à savoir : notre calcul ne prend pas en compte les majorations.
Exonération TVA : Le risque de re-qualification d’une action de formation
Depuis la réforme de la formation professionnelle et l’apparition de l’application CPF, ce cas de figure se répand de plus en plus.
La re-qualification d’une action de formation correspond à une conversion de cette action en action de prestation classique. C’est un peu confus ? voici un exemple très clair :
Depuis des années, vous proposez des formation Excel à 1000€. Votre demande d’exonération de TVA est à jour : jusqu’ici, tout va bien. Un jour anodin, la DIRECCTE vient effectuer un contrôle. Vous avez égaré certains justificatifs d’action de formation liés à vos prestations. Mécaniquement, votre actions de formation se transforment en prestation classique. Vous êtes donc soumis à la TVA. De ce postulat, deux conséquences :
- Si vous êtes financé pas un fond public comme l’OPCO, vous allez devoir rembourser la prestation à 100%, soit 1000€.
- Si vous êtes financé par une entreprise, l’on va vous demander de rembourser la TVA, soit 166,7€.
Et cela, c’est sans compter sur les fraudes liées à l’exonération de TVA !